Bruxelles et Strasbourg, cela semble loin quand on habite dans le Var. Et cela semble encore plus loin d'un point de vue "business". Pourtant, les fonds européens peuvent représenter pour des entreprises innovantes de formidables leviers de croissance et de développement, encore trop souvent ignorés par les entrepreneurs varois. Selon un récent sondage commandité par le réseau CCI France, ce sont en effet pas moins de 41% des entrepreneurs français qui ne perçoivent pas l'intérêt des fonds européens.
Pour porter la voix des chefs d'entreprise afin de contribuer à la future présidence française du Conseil de l'Union européenne au premier semestre 2022, le réseau des Chambres de commerce et d'industrie organise une Semaine européenne du 3 au 9 mai. Sur tout le territoire, 15 tables rondes réunissent des chefs d'entreprises et des décideurs publics qui témoigneront de leurs activités menées dans le cadre de dispositifs européens, ainsi que de leurs attentes sur le terrain. "Ce sera une semaine de l'Europe active sur tous les territoires, pour expliquer ce que les fonds européens peuvent apporter aux projets portés dans les domaines de la mobilité, de la transition écologique ou de la transition numérique", résume le secrétaire d'Etat Clément Beaune.
"Depuis 2015, 5,3 milliards de fonds européens ont été captés par les entreprises de la région"
Jeudi 6 mai, une table ronde régionale était ainsi organisée en direct de Marseille et en visioconférence, avec notamment en plateau la présence de Roland Gomez, président de la CCI PACA, et Isabelle Campagnola-Savon, vice-présidente de la commission Économie de la Région Sud. "5,3 milliards de fonds européens ont été captés par les entreprises de la région depuis 2015, rappelait-elle. Et notre objectif affiché pour la période 2021-2027 est d'arriver au seuil des 15 milliards, avec le réseau des CCI en tant que partenaire majeur et acteur complémentaire de notre action".
La table ronde s'est poursuivie autour de trois ateliers thématiques, le premier autour des défis énergétiques, le second autour de l'attractivité du territoire, et le troisième autour de la transition écologique et numérique. "Les CCI de France sont fortement mobilisées sur ce troisième volet, rappelait Pierre Goguet : 100 000 entreprises ont été sensibilisées, et plus de 15 000 ont été accompagnées par le biais du dispositif DigiPilot qui permet d'auditer sa maturité digitale".
Maillots de bain à base de filets de pêche et fromages protégés
La question des réglementations est souvent revenue dans les débats, auxquels ont participé plusieurs entrepreneurs varois. Ainsi, Stéphane Montagne, du cabinet Salamandre, qui œuvre dans la prévention et la gestion des risques professionnels, a attiré l'attention des députés européens sur le dossier de leur harmonisation, au niveau européen et entre les pays. Autre secteur d'activité, Julien Hubert, qui animera la fromagerie "Les Tontons Fromton" dans les halles de Toulon, est intervenu sur l'impératif de protéger les appellations et les spécificités des territoires, qui leur assurent bien souvent une belle visibilité et une grande attractivité touristique. Et bien qu'il travaille dans un domaine encore différent, celui de la valorisation des biodéchets - Davide Raffini, des "Alchimistes", a interpellé les élus sur l'impératif de mettre en place des cadres plus contraignants sur la gestion de ces biodéchets et leur nécessaire valorisation ou compostage. Des prises de parole qui ont fait réagir François Alfonsi, eurodéputé du groupe écologiste : "Sans doute est-il temps de fixer de nouvelles directives européennes en la matière", a-t-il assuré.
"Il nous faut apprendre à parler européen"
Basée à La Valette avec Seayouandi une marque de maillots de bain fabriqués à base de filets de pêche usagés, Cassandre Pucci va encore plus loin dans sa démarche en proposant des plongées à la découverte des fonds marins et des journées de ramassage des déchets sur les plages. Alors que son entreprise n'a que quelques mois d'existence, elle est inscrite dans le programme Marittimo Success, ce qui lui permet de développer son réseau et d'enrichir son vécu "business". Louant sa ténacité et sa créativité, François Alfonsi en a profité pour saluer le rôle majeur joué par les CCI dans l'accompagnement des jeunes entrepreneurs et leur fléchage vers des programmes européens.
Toujours dans le domaine de la mer, Alain Pro, qui conçoit avec GM Pro des ancres écoresponsables, a émis le souhait que les fonds européens soient plus facilement accessibles à des projets aux montants modestes, tout en avançant l'idée que l'Europe ne soit pas seulement là à l'amorçage du projet, mais tout au long de sa vie, avec un accompagnement dédié.
"C'est à nous, à travers le réseau des CCI, d'apprivoiser l'Europe, de la comprendre, c'est d'ailleurs un axe fort de notre mandature régionale, a synthétisé Roland Gomez, le président de la CCI PACA. Il nous faut tout simplement apprendre à parler européen". Une profession de foi validée par Pierre Goguet, président de CCI France, qui évoquait pour conclure le réseau Enterprise Europe Network, qui réunit des Chambres de commerce et d'industrie, Bpifrance ainsi que des agences régionales d'innovation ou d'internationalisation : "Il s'agit de l'un des outils incontournables de la diffusion par capillarité des informations liées à l'Europe, à ses programmes et aux financements disponibles".